Poix et dolia en pays boïate
27 juin 2015 17:58 0 messages
Philippe Jacques, De mémoire d’arbres, 2010, page 15, fig.14 |
Le territoire de la cité des Boïates occupait l’aire géographique des actuels pays de Buch au nord et de Born au sud, en relation directe avec la capitale Burdigala par deux grandes voies terrestres. Il bénéficiait d’une très large ouverture sur le golfe de Gascogne ce qui favorisait le commerce atlantique par cabotage. Sa capitale Boïos est idéalement placée au carrefour d’une des voies terrestres et d’une voie fluviale (la Leyre) ayant un accès direct à la mer. La physionomie de la frange côtière était foncièrement différente, l’exutoire du Bassin était inversé, les lacs formaient de petites baies et le cordon dunaire n’excédait pas dix mètres. La quasi-totalité des habitats antiques a livré des fragments de grandes jarres appelées dolia.
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Propositions des deux restitutions possibles de production de poix végétale, page 17, fig. 16-17 |
Ces dolia sont des récipients utilisés comme vases de stockage au début de l’époque antique puis remplacés par la barrique. Dans notre région, loin de disparaître, ils vont continuer à être produits pendant seize siècles, ce qui pose la question de leur fonction, dans un processus de production de la poix végétale. D’autant que leur forme ne change pas et se caractérise par une large lèvre rabattue.
Un dolium de grande capacité était installé en station fixe et de manière aérienne au sein d’un tumulus de sable, sans doute sur un petit socle bâti en pierres locales ou de récupération ou en briques. Le bois est introduit par l’orifice supérieur puis l’ensemble est refermé par un cuvier à collerette .
La combustion peut s’opérer de manière interne ou par un feu extérieur réalisé au sein du tumulus dans un four rudimentaire organisé autour du dolium.
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Fiche de l’INRAP : Audenge, artisanat de la poix à l’époque romaine : visite du chantier de fouille en 2009
Les fragments de jarres à poix sont présents sur toute l’emprise du site (700 tessons de jarres pour 800 tessons au total) dans les structures en creux, en calage de trous de poteau ou en réutilisation dans des structures liées à ces activités caractéristiques du secteur et de toute la façade atlantique sud.
La présence de mobilier domestique enregistrée à différents endroits très densément occupés par des structures en creux suggère une occupation durable depuis le Ier s. jusqu’au IIIe s. apr. J.-C. L’abondance de la céramique spécialisée (jarres, cuviers et autres récipients associés) n’a d’égale que la qualité et la variété du vaisselier domestique, depuis le vase commun à la céramique sigillée, des amphores aux poteries de Vayres et d’Aquitaine méridionale.
Le pin maritime, présent en position naturelle sur le littoral atlantique constitue bien évidemment la base de cette activité, activité qui répond sans doute pour une part à l’essor du vignoble aquitain mais également à la batellerie et au commerce florissant de ces zones littorales entre Aquitaine méridionale et septentrionale.
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Au musée du lac, Sanguinet, CRESS, cliché NathalieS. |
Archéologie expérimentale à Sanguinet : les Tessonades, Biscarrosse TV, Jérémie Vosges, CRESS, François Moser, Gwénolé Belbéoc’h.
Au sud, à Vielle-Saint-Girons dans les dunes littorales, fouille récente par Philippe Jacques, d’un site signalé par un membre de Mémoire en Marensin.
Carte actualisée, dans l’artisanat des produits goudronneux dans les Landes de Gascogne durant l’Antiquité, par Didier Vignaud |
Quelques références iconographiques et littéraires
Nous avions pris l’habitude de nous référer aux piceos malis describere Boios d’Ausonius (Carm., X, 241) ; hélas la dernière traduction bordelaise les transforme en "landais moricauds"...
Le poissage des dolia, une activité rurale "classique", représentée dans la mosaïque des quatre saisons de St Romain-en-Gal |
Le vin poissé ? Le vinum picatum des Allobroges est cité par Pline l’Ancien pour sa qualité. Source |
Pline, Histoire naturelle, XIV-8 : L’astringence de la poix versée sur le pédicule de la grappe donne aux grains ce corps et cette durée que, mise dans les tonneaux et les amphores, elle donne au vin. |
Épave à dolia en Étrurie, par Carre Marie-Brigitte. L’épave à dolia de Ladispoli (Etrurie Méridionale). [Etude des vestiges de la coque]. In : Archaeonautica, 11, 1993. pp. 9-29.
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