Difficultés d’apprentissages scolaires, Serge Boimare
MAJ 20140118
14 janvier 2009 21:24 0 messages
Notes prises au cours d’une conférence de Serge BOIMARE, psychopédagogue, directeur pédagogique du centre Claude Bernard à Paris
Vidéo sur les enfants empêchés de penser
On ne peut pas expliquer les difficultés d’apprentissage de certains enfants par un manque ou un déficit, à combler par des outils pédagogiques différents : il s’agit en fait d’un fonctionnement intellectuel singulier, tronqué.
Cet échec se retrouve chez les adolescents dans les trois domaines
- LIRE (ne retrouvent pas le thème d’un texte),
- ÉCRIRE et
- PARLER (restent dans le domaine de la connivence et n’accèdent pas au langage argumentaire).
Certes il est possible d’attribuer ces difficultés aux trois causes habituelles
des enfants qui ne supportent pas la contrainte car ils n’ont pas appris à gérer la frustration et n’ont pas été encouragés à pratiquer l’interaction langagière ;
des enfants aux compétences défaillantes : mémoire, concentration, problèmes de contrôle moteur, difficultés à se situer dans le temps et dans l’espace ;
un problème de société où sexe, violence et argent sont omniprésents.
Ces causes ne servent qu’à se disculper : car les outils proposés en aide spécialisée (ralentir le rythme, entraîner l’enfant, le mettre en confiance, avoir recours à la motricité, au concret ou au visuel) sont inefficaces avec ces enfants-là qui continuent à s’opposer, à bouger, à résister.
Actuellement, on observe que 15% d’une classe d’âge scolaire n’entre pas dans la situation d’apprentissage.
La confrontation avec le temps du doute est source de déstabilisation.
Ces enfants ont peur de cet entre-deux, de ce moment où il faut chercher, associer, imaginer car il déclenche en eux des sentiments parasites, des frustrations, des craintes anciennes.
Remise en cause = rencontre de nos propres manques, dans un moment de grande solitude.
Ces enfants cherchent à contourner ce moment, réaménagent leurs stratégies d’apprentissage, et déclenchent un évitement de penser qui parasite.
Leur curiosité n’arrive pas à s’intéresser à l’universel, aux règles et se contente des trois ressorts primitifs que sont le sadisme, le voyeurisme et la mégalomanie.
Ils passent immédiatement le relais au corps :
- soit en bougeant,
- soit en s’endormant (chute de tonus),
- soit par des troubles psycho-somatiques (mal au ventre, à la tête, crampes).
Comportements particuliers de l’évitement de l’apprentissage
- conformisme de pensée : ils choisissent de refaire ce qu’ils savent faire, si bien que l’éducateur se pose des questions sur le potentiel réel de ces enfants
- choix de faire des associations immédiates pour éviter les associations réfléchies et ne pas entrer dans le temps du vide et de l’insécurité
- renforcer un besoin de certitude par l’arrogance, le mépris de la réflexion.
Le langage ne passe pas le cap de l’argumentaire, la boucle de l’intériorisation : c’est celui qui parle le plus fort qui a raison.
Quelles propositions ? Comment aider les enfants à douter, à se servir de leurs capacités réflexives ?
Les deux outils à disposition des pédagogues sont un nourrissage culturel intensif et l’entraînement à parler pour aider la pensée à se structurer, dans le cadre d’une relation sécurisante, donnant ainsi aux enfants la possibilité de se désintoxiquer de leurs projections bizarres.
SUR LE PLAN PRATIQUE
Une demi-heure de lecture quotidienne à voix haute par l’enseignant de textes forts et évocateurs permettant de mettre des mots sur des problèmes existentiels et des émotions,
suivie de vingt minutes de débat.
Quels textes ? des contes, des mythes, de la poésie, des romans initiatiques, des périodes historiques romancées ;
Quels thèmes ? l’origine, les conflits familiaux, la séparation, la rivalité, la loi opposée au désir, la place dans le groupe.
QUELS OBJECTIFS ?
Mettre en place une culture commune dans le groupe classe hétérogène ;
Répondre enfin à la curiosité primaire flattée par le monde environnant des feuilletons, des spots publicitaires, en aidant à mettre des mots ;
Donner des figurations, des représentations organisées de ce qui inquiète, grâce à ces scénarios ;
Revitaliser les savoirs, donner du sens aux exercices, même en mathématiques (le sens de l’énigme).
L’empêchement de penser,
c’est difficile à combattre
et c’est contagieux
La médiation culturelle aidera l’enseignant à reformuler sa capacité à trouver du plaisir dans la transmission.
Le travail de co-réflexion l’aidera à se montrer dans une situation qu’il ne maîtrise pas.
UN PROJET DE LIAISON ÉLÉMENTAIRE-SECONDAIRE à NICE
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